Sensibiliser et interdire, cela ne suffit plus !

Sensibiliser et interdire, cela ne suffit plus !

Une enquête nationale menée par la Fondation contre le Cancer et le SPF Santé Publique révèle une réalité préoccupante : la dépendance tabagique n’est pas suffisamment prise en charge dans le système de santé belge. Il est urgent de passer à la vitesse supérieure pour soutenir le sevrage tabagique.

Plus de 18 000 professionnels de santé – médecins, infirmier·ères, sage-femmes, psychologues et pharmacien·nes – ont participé à cette enquête visant à comprendre la prise en charge réelle de la dépendance tabagique. Objectifs : analyser les pratiques, identifier les obstacles et cerner les besoins afin d’améliorer l’aide au sevrage.

L’enquête, qui a suscité un réel engouement, montre que le potentiel du secteur est considérable mais largement sous-exploité, principalement par manque de temps, de ressources, de formation spécialisée et de coordination entre intervenants.

Intégrer le sevrage aux soins

La consommation de tabac tue encore plus de 9 000 personnes en Belgique par an. La plupart des personnes qui fument ont commencé avant 21 ans, sans en percevoir les risques. La dépendance s’installe rapidement, et si beaucoup souhaitent arrêter, les produits de tabac sont conçus pour être fortement addictifs.
Un accompagnement concret et structuré est donc essentiel. Le simple « Vous devriez arrêter de fumer », glissé rapidement par votre médecin ne suffit pas : la dépendance tabagique doit être abordée systématiquement par tous les professionnels de santé et intégrée par défaut dans chaque trajet de soins.

Intervenir plus tôt

Traiter la dépendance tabagique plus tôt permettrait d’éviter l’apparition de nombreuses pathologies. Malgré cela, le comportement tabagique est rarement abordé lors d’une première consultation, et encore moins lorsqu’il s’agit d’une consultation de suivi. La réalité est pourtant très différente chez les professionnels traitant les pathologies liées au tabac, comme les cardiologues, les pneumologues et les oncologues, qui l’abordent de manière plus systématique.

Agir en profondeur

Lorsque la question du tabac est abordée en consultation, très peu de professionnels de santé adoptent un rôle pro-actif dans le sevrage tabagique (21%). C’est heureusement davantage le cas parmi les médecins traitant de pathologies liées au tabac :
• 49% des oncologues,
• 70% des cardiologues,
• 80% des pneumologues,
Ainsi que parmi les professionnels de santé ayant déjà suivi la formation en tabacologie, soulignant la plus-value de cette formation.
Les actions entreprises par les professionnels de santé ayant un rôle pro-actif restent néanmoins superficielles et abstraites.
• Seuls 13% donnent des astuces concrètes
• 12% réfèrent à un tabacologue ou à des outils d’aide à l’arrêt
• 4% proposent des aides pharmacologiques (substitution nicotinique ou autre)
• 4% proposent un plan d’action concret

Nos pistes d’action

Les professionnels de santé ont un rôle important à jouer pour encourager leurs patients à arrêter de fumer. De manière systématique, et sans que cela ne doive prendre trop de temps, il est nécessaire de récolter les informations sur la consommation tabagique, proposer une aide, et assurer le suivi soit lui-même, soit le cas échéant en faisant appel à d’autres professionnels de la santé, tels que les tabacologues.
• L’inclusion des comportements tabagiques dans l’anamnèse par les différents professionnels de santé, pour assurer une prise en charge de la dépendance tabagique plus tôt, avant l’apparition de pathologies liées au tabac.
• L’intégration par défaut du traitement de cette dépendance dans les trajets de soins, selon la méthode « opt-out », comme pour le diabète ou l’hypertension.
• Une meilleure mise en réseau des professionnels de santé et des tabacologues pour assurer une continuité entre détection et prise en charge de la dépendance tabagique.

Un large soutien du terrain

• 86 % des professionnels soutiennent l’intégration du sevrage dans les trajets de soins
• 77 % demandent un meilleur remboursement des consultations tabacologiques
• 68 % celui des substituts nicotiniques.

« N’attendons pas qu’un problème de santé survienne pour aider les personnes qui fument à se défaire de la dépendance tabagique. Abordons-la plus tôt, par défaut, et intégrons son traitement dans tous les trajets de soin, comme cela se fait déjà pour le traitement du diabète ou de l’hypertension » Nora Mélard, experte Tabac à la Fondation contre le Cancer.

Un projet pilote en hôpital

Le SPF Santé Publique a récemment alloué un budget de plus de 2 millions d’euros pour le développement d’un projet pilote dans 12 hôpitaux belges. L’objectif est de faire de chaque contact ou séjour hospitalier une opportunité pour les professionnels de santé d’aborder l’arrêt du tabac avec les personnes qui fument, tout en assurant un suivi après leur sortie.

La Fondation contre le Cancer salue cette initiative essentielle et espère qu’elle ouvrira la voie à un renforcement durable des moyens consacrés à la prise en charge de la dépendance tabagique.

Enquête tabac 2025